autobio
Lire
Les livres ont toujours habité mon espace quotidien. Ainsi, avant de savoir lire, je feuilletais déjà avec curiosité des volumes de la biliothèque rose comme Cadichon, Jojo Lapin et Barbie. A partir des illustrations, j'en devinais l'histoire, qui se réinventait chaque fois.
J'entrai un beau jour à mon école primaire, au Pont du Las. Une petite bibliothèque, mon premier CDI. Mais en CP, on a déjà fort à faire pour apprendre à lire et à écrire, et je partai de cette école dans mon année de CE1, mes parents déménageant.
Arrivée à la Rivière Neuve II, j'écume les rangs des Chair de Poule, vous savez, cette collection faite de mauvaise littérature américaine destinée à faire frissonner de jeunes lecteurs. Chose étrange, maintenant je n'aime plus la littérature d'épouvante, ni quoi que ce soit qui se rapporte à l'horreur!
Je me souviens aussi de ces livres aux couvertures très colorées plus larges que hauts, qui contaient les aventures de géants, de fées...
Un jour j'ai emprunté Petit Grounch à l'école. Le titre ne doit pas vous parler beaucoup, mais j'ai appris deux choses grâce à ce livre : la première, toute bête : un franc vaut cent centimes. La deuxième c'est que le savoir se trouve dans les livres. A l'époque on ne m'embêtait pas encore avec "tu dois lire des oeuvres littéraireuh!" donc pour moi chaque livre en valait un autre. C'est quand même mieux, non?
Ce noël là, ma demi soeur m'a offert un truc génial : l'encyclopédie des enfants. Et là, bibi sur le tapis qui entend même plus ce qu'on lui dit : j'avais ouvert le premier chapitre, sur l'espace, et ma tête était partie dans les étoiles... J'ai gardé cette encyclopédie pendant des années. A chaque fois que je voulais l'ouvrir, j'étais partie pour lire et relire, redécouvrir pendant des heures chaque chapitre. Les cartes me faisaient voyager à la découverte de nouveaux peuples et animaux, je suis entrée dans une usine et j'ai fabriqué des pots de confiture et des baskets. Le verre est fabriqué avec un alliage de sables. Cela me paraissait incroyable que l'on puisse tirer un matériau fragile et transparent d'un autre opaque et millénaire.
Ce bouquin a fait naître une anecdote qui nous fait encore rire, ma mère et ma soeur et moi : dans le chapitre sur le corps il était écrit que la surface de la langue était constituée de papilles gustatives. Je débarasse la table et mets malencontreusement un doigt dans de la sauce béarnaise. je porte le doigt à ma bouche, par curiosité et je m'exclamme :"Ah! C'est acide!" Ma mère le niant, je rétorque, avec l'air de quelqu'un de très intelligent : "Mes papilles gustatives décèlent une acidité dans la sauce bearnaise". Et là, gros éclat de rire. J'ai été étonnée, où était le problème, j'avais pourtant employé le bon mot...
Ce même noël on m'a offert quelques livres de Disney, avce les images des dessins animés et tout et tout. Mon plaisir était de prendre un coin de page et le faire descendre en le tenant bien droit, le bruit m'était agréable, la sensation aussi, mais je me suis rendue compte que j'abîmais les pages ainsi, j'ai préféré arrêter, mais le mal était fait...
Une histoire qui m'a marquée, aussi, c'est le pays des 36 000 volontés : le temps d'un rêve, des enfants pouvaient faire leurs 36 000 volontés. On s'habillait avec un morceau de ciel déchiré par un aigle, on avait des ailes de fées, et surtout on pouvait faire apparaître des choses à volonté!
Je me souviens aussi avoir été choquée par un livre de légendes grecques : on voyait des corps nus partout, je trouvais ça indécent de mettre ça dans un livre destiné aux enfants!
En CM2 j'ai étudié Les chasse-marée d'Alain Grousset, mon premier livre de science-fiction, et les douze pendules de Théodule de l'illustre Alfred Hitchcock.
Me voilà arrivée en sixième, petite intello...mais je n'étais pas attirée par le CDI, la documentaliste ne m'était pas franchement sympathique. Puis elle était bizarre, toujours la même coiffure, on pensait qu'elle mettait une perruque, et trop de fond de teint, qui de toute façon ne réussissait pas à masquer les trous dans sa peau... Par la suite, en ciquième, elle a eu de bonnes raisons de me détester! Avec ma bande, on était des petits rebelles qui mettaient le bazar!
Harry Potter? Non, m'intéresse pas...ce nom me paraissait ridicule, Potter... Mais bon, suite à la pression de mes camarades, je me les suis fait prêter et...j'ai tout dévoré! La même chose s'est produite avec Ewilan, plus tard...les trilogies me rebutaient par leurs dessins sur les couvertures. Et encore pareil pour Firewing, Sunwing et Silverwing (désolée si l'ordre n'est pas le bon), cette trilogie sur des chauves-souris qui semble extra mais que je n'ai toujours pas lue...
Voilà : j'aimais lire, mais sans plus. J'avais d'autres loisirs, à l'époque. Des amis facilement joignables. On allait en ville. On jouait aux jeux vidéos. Pourquoi irais-je m'enfermer toute seule dans ma chambre?
Et puis, à la fin de mon année de cinquième, j'ai quitté ma ville natale du Sud pour la Normandie. Dépaysement total. Tout vert que ça en fait mal aux yeux et à la tête. Pas un bâtiment, pas un immeuble à des dizaines de kilomètres à la ronde. Une ville qui n'en est pas une, pas de feux tricolores, pas de rond-point. Des maisons amassées dans un coin qui forment un petit village traversé par une route nationale. Et des champs partout tout autour.
Le collège. Un collège, ça? Je suis passée d'une "usine" d'un millier d'élèves et trente-six c l a s s e s à quelques quatre cent têtes et seize c l a s s e s . Mon tempérament franc et un tantinet baguarreur ne plaisait pas. J'étais moquée pour mon accent. J'ai été évincée avec une étiquette "intello" car je dépassais les habituelles têtes de c l a s s e. Je trainais avec des sixièmes qui voulaient bien de moi ou des troisièmes peu recommendables. Et puis, au hasard de mes pérégrinations, j'ai découvert le CDI. Les couleurs et le sourire des documentalistes m'ont rendu ce lieu tout à fait sympathique. Des livres étaient exposés sur une table, tenus verticalement. Il y avait un coin lecture avec des des bancs rembourrés et des coussins sur de la moquette. C'est à partir de là que ce lieu est devenu ma retraite, et que ma boulimie des livres à commencé. Je pouvais lire jusqu'à 256 pages par jour de cours, soit deux livres environ. Je lisais en cours, aux récréations, et bien sûr chez moi, après avoir rapidement expédié mes devoirs. Je lisais tout le temps, tout le temps. Il me reste encore un de ces marque-pages où je notais soigneusement le titre, l'auteur et l'édition à l'intérieur. Quand je suis venue chercher mon deuxième, la documentaliste avait fait des yeux ronds quand elle avait vu que le premier était déjà plein. Je suis devenue une hôte "de marque" : même quand il y avait des c l a s s e s, je pouvais rentrer pour aller lire dans mon coin. Ah, ça, je ne gênais personne! J'y ai construit mes premières bases littéraires jeunesse, bien que de nombreux titres aient échappé à ma mémoire. En voici quelques-uns, en vrac : "Tu sais quoi?" de Mikaël Ollivier, lu en une heure. "Ceinture Noire", l'histoire d'un garçon manqué au judo et d'un jeune premier tout nouveau. "Deux pour l'une", une histoire sur Louise et Lotte, deux jumelles séparées à la naissance, écrite par un auteur allemand. Le premier Alex Rider : Stormbreaker, de Anthony Horowitz. Le recueil de nouvelles de science-fiction "Graines de futur"de la collection Autres Mondes. Il y a une histoire de chasse au loup-garou, qui s'est révélé ne pas en être un, dont j'ai oublié le nom. Il y avait parfois des paroles grossières, mais cela collait bien au récit. Désolée, j'ai oublié le nom! En revanche, Zazie dans le métro m'a profondément outrée, je l'ai détesté et je ne l'ai jamais fini, les grossièretés me semblaient particulièrement déplacées!
J'ai déménagé encore une fois, durant les "grandes grèves" de 2003. Mon départ est plus ou moins passé inaperçu, ce qui n'était pas pour me déplaire. Mes relations privilégiées avec les documentalistes et certains professeurs, mon goût pour la lecture et mon habitude à la solitude agaçaient mes camarades.